La biographie d’Edouard Louis n’est clairement pas banale pour un écrivain : originaire de la Picardie profonde, l’auteur se retrouve à 21 ans à l’ENS. Né sous le nom d’Eddy Bellegueule, il décide d’en changer, reniant ainsi toutes ses origines et devient Edouard Louis en 2013. Ce livre, En finir avec Eddy Bellegueule, c’est le roman de son enfance, c’est une peinture violente du monde dans lequel il a évolué.
En finir avec Eddy Bellegueule : Quatrième de couverture
En vérité, l’insurrection contre mes parents, contre la pauvreté, contre ma classe sociale, son racisme, sa violence, ses habitudes, n’a été que seconde. Car avant de m’insurger contre le monde de mon enfance, c’est le monde de mon enfance qui s’est insurgé contre moi. Je n’ai pas eu d’autre choix que de prendre la fuite. Ce livre est une tentative pour comprendre.
En finir avec Eddy Bellegueule : Mon avis
J’ai été très touchée par ce roman. Déjà parce qu’il dépeint un monde que je connais bien. Je viens en effet de Picardie (mais la Picardie parisienne). Toutefois, je connaissais beaucoup d’amis qui vivaient dans cette Picardie profonde que nous décrit Edouard Louis dans « En finir avec Eddy Bellegueule« . Cette pauvreté, cette misère culturelle, cette violence gratuite, cette vulgarité permanente, ce racisme omniprésent et cet alcoolisme qui se répandent.
Je n’imagine pas comment son roman a été reçu par ses proches…
D’après ce que j’ai lu son père et lui ne se parlent plus. Ce dut être très difficile et humiliant pour sa famille de lire et ces descriptions si réalistes et si tristes qu’il fait d’eux. A côté de cela, comme il le dit, c’est un livre pour comprendre. Car avant de s’insurger contre les siens, ce sont les siens qui se sont insurgés contre lui.
De nombreux passages sont puissants, d’autres choquants, d’autres encore vraiment intéressants. La plume d’Edouard Louis est fluide ce qui facile la lecture. Le roman peut néanmoins être difficile à lire tant il transpire la violence de partout. Tous les moments où il donne la parole à ses proches, le texte est mis en italique. Comme s’il prenait de la distance avec eux même dans la forme, comme s’il disait « Ça c’est eux, ce n’est pas moi« .
Un combat pour la fuite
Quand on aime les garçons et qu’on fait partie de cette classe sociale, la honte n’en est que plus grande. D’où le rejet qu’Edouard Louis a dû subir toute son enfance, ne se sentant jamais à sa place, jamais comme il faut. En finir avec Eddy Bellegueule est donc un cri du coeur d’un enfant incompris. Je n’ai pu m’empêcher (désolée) de penser au film de ma jeunesse « Mathilda ».
L’auteur nous décrit avec précision les soirées Pastis et Ricard devant la télévision (qui est obligatoire), le manque d’hygiène de ses proches jusqu’à nous décrire les excréments de chiens avec lesquels certains vivent, les pots de lessive qui servent de carafe d’eau, le harcèlement scolaire jusqu’à devoir lécher son propre mollard ou encore les canapés poisseux comme celui sur lequel son père a été mis au monde.
Un roman choc.
Quelques extraits du roman En finir avec Eddy Bellegueule
« De mon enfance je n’ai aucun souvenir heureux. Je ne veux pas dire que jamais, durant ces années, je n’ai éprouvé de sentiment de bonheur ou de joie. Simplement la souffrance est totalitaire : tout ce qui n’entre pas dans son système, elle le fait disparaître. »
« Je ne sais pas si les garçons du couloir auraient qualifié leur comportement de violent. Au village les hommes ne disaient jamais ce mot, il n’existait pas dans leur bouche. Pour un homme, la violence était quelque chose de naturel, d’évident. »
« Comme tous les hommes du village, mon père était violent. Comme toutes les femmes, ma mère se plaignait de la violence de son mari. »
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