Je n’ai jamais vraiment su si c’est l’Histoire avec un grand H qui m’a donné le goût des petites histoires ou si ce sont les petites histoires de mes livres d’enfant qui m’ont fait aimer la grande Histoire. Très vite en tout cas, j’ai aimé les romans historiques et les autobiographies. Beaucoup de livres donc qui m’ont raconté de belles histoires mais m’ont aussi donné goût à leur trame historique. A partir de là, je me suis découvert une vraie curiosité pour notre passé, parfois lors de ses heures les plus sombres. Les deux livres que je choisis de vous faire partager dans cet article sont des témoignages, romancés, mais avant tout historiques. Leur point commun : deux histoires d’enfants super-héros pris dans la tourmente de l’Histoire. Ces livres m’accompagnent depuis longtemps, ils font partie de ma bibliothèque et m’en séparer est impensable. Ces deux livres mettent en avant l’amour fraternel qu’il soit de sang ou de cœur, la survie, le courage, la force de caractère d’enfants, de petits garçons face à des épreuves qu’ils n’auraient jamais dû avoir à vivre. Pris dans les méandres de l’histoire, ils sont un exemple de résistance face à des adultes et à un monde violent, et cet amour fraternel, cette solidarité qui les unit va les aider pour la plupart à surmonter des épreuves incroyables. Ces deux livres sont bouleversants et j’ai voulu rendre hommage à ces enfants en vous les partageant.
Les enfants de l’île du Levant de Claude GRITTI
Dans Les enfants de l’île du Levant, l’auteur, qui s’est plongé dans les archives pour de véritables recherches historiques, nous plonge dans l’univers cruel des prisons pour enfants et colonies agricoles des années 1860. En 1861, une soixantaine de garçons de 5 à 17 ans partent à pied de la prison de la Roquette à Paris pour être transférés dans la colonie agricole de l’île du Levant en Méditerranée au large de Hyères.
Arrêtés pour vagabondage la plupart du temps faute de famille, pour vols de nourriture, ces orphelins ou enfants abandonnés se retrouvent en prison. Le gouvernement impérial décide de créer ces colonies soi-disant œuvres philanthropiques pour aider et rééduquer ces garçons par l’enseignement, le travail et les valeurs morales et religieuses. La réalité est toute autre : travail forcé comme dans les bagnes pour hommes, malnutrition, sévices, maladies. Ces colonies sont gérées par des responsables voulant uniquement pouvoir et enrichissement personnel.
Grâce à ce récit plein de justesse sur le destin de ces enfants, nous pouvons suivre leur parcours de vie émouvant et révoltant, la lutte pour leur survie jusqu’à ce qu’ils gagnent enfin pour certains leur liberté à 18 ans. Certains vont s’unir face à l’horreur pénitentiaire, les plus âgés se comportant en guides, en grands frères pour les petits créant ainsi leur propre famille solidaire et loyale, développant un véritable amour fraternel. Et nous nous laissons porter par l’histoire et le destin de ces enfants bagnards « résistants », aux multiples dénouements, parfois tristes parfois heureux.
Un sac de billes de Joseph JOFFO
Une autre époque, une des pires périodes de notre Histoire, la Seconde guerre mondiale, a vu naître l’histoire bouleversante de deux frères. Dans Un sac de billes, Joseph et son frère Maurice, deux gamins juifs, doivent fuir Paris pour atteindre la zone libre en 1942. Joseph nous livre son témoignage tantôt apeuré tantôt joyeux, avec son ton volontairement enfantin, ses anecdotes pour nous raconter ce périple incroyable à travers la France occupée de deux enfants de 10 et 12 ans que leurs parents font partir une nuit pour les sauver.
Leur but ? Arriver sains et saufs chez leurs grands frères en zone libre. Chaque étape de leur voyage est synonyme de danger pour ces deux enfants juifs allant seuls dans la France alors occupée par l’Allemagne nazie. Chaque rencontre peut les sauver ou les perdre, être une main tendue patriote ou un piège collabo. Leur seule option ? Mentir sur leur identité, leur religion tout en restant crédibles.
Débrouillards, malins et dotés d’un sang-froid incroyable, ils vont tester leur solidarité, leur fraternité malgré leurs disputes, leur loyauté et faire preuve de bravoure, d’intelligence et de maturité, comprenant très vite le danger qui les entoure.
Émouvants, touchants, mais aussi douloureux et révoltants, ces témoignages nous enseignent le courage et l’espoir de jeunes garçons lors de deux périodes sombres de notre histoire. Ils ont lutté pour leur survie, leur liberté et leur avenir, pour avoir le droit de devenir des hommes.
Ces enfants, adultes malgré eux bien avant l’heure, ont pris en main leur destin face à ce qui peut exister de pire chez l’être humain ; le profit, le rejet, la violence, l’intolérance, la haine, pour atteindre une certaine forme de déshumanisation. Mais ils ont décidé de répondre par le courage, la force, la solidarité, l’amour fraternel, l’humanité, la vie !
Peu importe l’époque, il y a, hélas, toujours un combat à mener. La vie est un cadeau précieux, l’instinct de survie est naturel et ses enfants en sont la preuve.