Jorge Luis Borges, né en 1899 à Buenos Aires, est un écrivain, poète et nouvelliste, célèbre pour son talent de conteur et la richesse de l’imaginaire fantastique de ses récits. Il a fondé plusieurs revues, s’est connaître avec « Histoire universelle de l’infamie » et devient célèbre grâce à ses recueils de nouvelles. Il y exprime, dans une langue poétique, des visions fantastiques parfois angoissantes. Grand érudit, Borges pratique l’intertextualité : son œuvre est parsemée de références et d’allusions littéraires. Dans les années 1950, il enseigne à l’université de Buenos Aires et obtient le poste de directeur de la bibliothèque nationale. Sa renommée devient internationale. C’est aussi à cette période qu’il commence à perdre la vue et devient aveugle en 1955, mais continue à écrire, avec l’aide de son assistante. Il décède en 1986 des suites d’un cancer du foie. Son œuvre a été couronnée par de nombreux prix. On lui attribue le très beau texte suivant, Avec le temps.
Avec le temps de Jorge Luis Borges : un texte pour ceux qui veulent apprendre de leurs relations
Ce texte de Borges reflète formidablement tout ce que l’on peut apprendre au cours de notre vie. C’est un bon exercice de le lire afin d’en comprendre le sens et de voir ce que l’on peut changer afin d’améliorer nos relations.
On ne devrait accorder de l’importance qu’aux personnes qui nous apprécient vraiment et ne pas faire une priorité de celles pour qui nous ne sommes qu’une option.
Si la plupart du temps c’est une chose difficile à faire, c’est généralement parce que bien souvent on espère que l’égoïsme se transforme en reconnaissance et en intérêt mutuel.
Cependant, lorsqu’on adopte une telle philosophie, en fait, on fait passer les volontés des autres avant notre bien-être, on se voile la face et on n’écoute pas nos besoins affectifs.
Avec de telles idées, on ruine notre présent afin d’alimenter des espoirs de changements qui n’arrivent jamais.
Pour certaines choses, le temps est notre grand maître, car grâce à lui, on prend de la distance par rapport aux choses, aux autres et à nous-mêmes. Cela ne veut pas dire que le temps dit tout ni qu’il guérit toutes les blessures.
Cela signifie qu’on doit prendre position sans laisser les autres profiter de nous par peur du rejet ou de l’affrontement. Il est important d’apprendre à dire non, à faire valoir notre présence et à chercher en nous un allié pour faire face à ces relations basées sur l’inégalité et sur l’égoïsme de personnes qui ne pensent qu’à elles.
Apprenez à offrir votre absence à ceux qui ne savent pas apprécier votre présence.
Avec le temps de Jorge Luis Borges
« Avec le temps, j’ai appris la subtile différence qu’il y a entre prendre la main de quelqu’un et enchaîner une âme.
Avec le temps, j’ai appris qu’aimer, ce n’est pas s’appuyer sur quelqu’un, et que ce n’est pas parce qu’on est aux côtés de quelqu’un qu’on est en sécurité.
Avec le temps, j’ai commencé à comprendre que les baisers ne sont pas des contrats, et que les cadeaux ne sont pas des promesses.
Avec le temps, j’ai appris qu’être avec quelqu’un parce qu’il nous donne accès à un bel avenir implique que tôt ou tard, on voudra retrouver notre passé.
Avec le temps, vous vous rendez compte du fait que se marier seulement parce que « le temps presse », c’est un clair avertissement vous alertant que votre mariage se soldera par un échec.
Avec le temps, j’ai compris que seuls ceux qui sont capables de vous aimer avec vos défauts, sans prétendre vous changer, peuvent vous apporter tout le bonheur que vous désirez.
Avec le temps, vous vous rendez compte que si vous êtes aux côtés de cette personne seulement pour ne pas être seul, irrémédiablement vous finirez par ne pas vouloir la revoir.
Avec le temps, vous vous rendez compte que les vrais amis valent bien plus que tout l’or du monde.
Avec le temps, j’ai compris que les vrais amis se comptent sur les doigts de la main, et que celui qui ne lutte pas pour eux tôt ou tard se verra entouré seulement de faux amis.
Avec le temps, j’ai appris que les propos que l’on peut tenir lorsqu’on est en colère peuvent continuer à blesser ceux qui à qui vous les avez adressés tout au long de leur vie.
Avec le temps, j’ai appris à tout excuser, mais le pardon est réservé aux grandes âmes…
Avec le temps, j’ai compris que si vous avez durement blessé un ami, très probablement que l’amitié entre vous ne sera jamais plus la même.
Avec le temps, vous vous rendez compte que même si vous êtes heureux avec vos amis, un jour, vous pleurerez ceux qui vous ont laissé partir.
Avec le temps, vous vous rendez compte que chaque expérience vécue avec une personne est unique.
Avec le temps, vous vous rendez compte que celui qui humilie ou méprise un être humain tôt ou tard souffrira quatre fois plus intensément des mêmes humiliations ou du même mépris.
Avec le temps, j’ai appris à construire tous mes chemins dans le présent, car le terrain du futur est trop incertain pour qu’on puisse y faire des plans.
Avec le temps, j’ai compris que si l’on force les choses, finalement, tout ce que l’on récoltera, c’est qu’elles ne se produiront pas dans le cadre que l’on aurait espéré.
Avec le temps, vous vous rendez compte qu’en fait, le meilleur, ce n’est pas le futur, mais le moment que vous êtes en train de vivre.
Avec le temps, vous verrez que même si vous êtes heureux auprès de ceux qui sont à vos côtés, vous regretterez terriblement ceux qui hier étaient avec vous et qui aujourd’hui sont partis.
Avec le temps, j’ai appris qu’essayer de pardonner ou de demander pardon, dire à quelqu’un que vous l’aimez, lui dire qu’il vous manque, lui dire que vous avez besoin de lui, lui dire que vous aimez être son ami…face à une tombe…ça n’a aucun sens…
Mais malheureusement…on ne comprend tout cela qu’avec le temps. »
Jorge Luis Borges