J’aime la plume trash et pourtant si juste de Virginie Despentes. Fan inconditionnelle de sa trilogie Vernon Subutex, cette Comédie Humaine contemporaine et incisive, je me suis procuré Cher Connard dès qu’il a été en vente. Ai-je été conquise ou déçue ? Je vous dis tout !
Cher Connard de Virginie Despentes : Résumé :
C’est une suite de lettres entre amis qui se sauvent la vie. Dans ce roman épistolaire, Virginie Despentes revient sur le thème qui unit tous ses livres – comment l’amitié peut naître entre personnes qui n’ont à priori rien à faire ensemble.
Rebecca a dépassé la cinquantaine, elle est actrice, elle est toujours aussi séduisante. Oscar a quarante-trois ans, il est un auteur un peu connu, il écoute du rap en essayant d’écrire un nouveau livre. Ils sont des transfuges de classe que la bourgeoisie n’épate guère. Ils ont l’un comme l’autre grandi et vieilli dans la culture de l’artiste défoncé tourmenté et sont experts en polytoxicomanie, mais pressentent qu’il faudrait changer leurs habitudes. Zoé n’a pas trente ans, elle est féministe, elle ne veut ni oublier ni pardonner, elle ne veut pas se protéger, elle ne veut pas aller bien. Elle est accro aux réseaux sociaux – ça lui prend tout son temps.
Ces trois-là ne sont pas fiables. Ils ont de grandes gueules et sont vulnérables, jusqu’à ce que l’amitié leur tombe dessus et les oblige à baisser les armes.
Il est question de violence des rapports humains, de postures idéologiques auxquelles on s’accroche quand elles échouent depuis longtemps à saisir la réalité, de la rapidité et de l’irréversibilité du changement. Roman de rage et de consolation, de colère et d’acceptation, Cher connard présente une galerie de portraits d’êtres humains condamnés à bricoler comme ils peuvent avec leurs angoisses, leurs névroses, leurs addictions aux conflits de tous ordres, l’héritage de la guerre, leurs complexes, leurs hontes, leurs peurs intimes et finalement – ce moment où l’amitié est plus forte que la faiblesse humaine.
Cher connard de Virginie Despentes : Mon avis
Le choix du genre épistolaire :
Je suis écrivaine publique spécialisée dans le courrier sentimental, évidemment le genre épistolaire me parle et j’avais hâte de découvrir ce que Despentes allait en faire. Je dois dire que j’ai été déçue au niveau de la forme et du style car il m’a semblé que le moyen choisi pour raconter cet histoire avait été sélectionné davantage pour sa facilité à évoquer bout à bout des idées sans s’embêter à chercher une trame et un rythme bien ficelé.
J’ai eu l’impression que les trois personnages, à savoir Oscar l’écrivain célèbre et alcoolique, Rebecca l’actrice quinquagénaire à succès et Zoé la féministe influenceuse, avaient tous la même façon de s’exprimer, sans aucune différence de ton. Despentes n’a pas, selon moi, cherché à les distinguer par le langage et la manière de s’exprimer : tous sont trash. On a l’impression du coup que c’est elle qui s’exprime à travers chacun d’eux. J’ai lu que Cher connard avait été comparé aux Liaisons dangereuses de Laclos… C’est un peu tiré par les cheveux, tous les romans épistolaires ne valent pas le chef-d’œuvre de Laclos avec ses rebondissements et ses manigances diaboliques ! Et celui-ci, en aucun cas !
J’ai eu du mal à rentrer dedans
Tout d’abord parce que, comme je viens de le dire, je m’attendais à lire un roman épistolaire avec des personnages vraiment différents avec un style qui leur était propre, ce qui n’était pas le cas. J’aurais aimé que cela soit plus construit, personnellement je n’écris ni mes lettres ni mes mails comme je parlerais en face avec quelqu’un. Dans ce roman, les lettres/mails ressemblent plus à des dialogues en face à face avec leur langage parlé. Enfin, il n’y a quasiment pas d’impact ou pas de réponse entre les personnages, on dirait qu’ils parlent tous à un mur.
Ensuite, j’ai trouvé le début un peu décousu : Oscar envoie un mail assassin à Rebecca et très très vite ils se racontent leur vie… Bon ça faisait un peu racoleur comme début (début qui a d’ailleurs été choisi comme quatrième de couverture).
Les personnages sont à claquer
Je n’ai eu aucune empathie pour les personnages, ils m’ont tous exaspérée au plus haut point ! Rebecca avec son autoglorification, Oscar avec sa position de victime, et Zoé haineuse et accro aux réseaux.
N’ai-je RIEN aimé dans ce roman ?
Si ! Parce que ça reste Despentes, que j’aime ses punchlines et sa plume acérée. J’aime cette violence qui cache tant de mal-être, j’aime les questions qu’elle soulève sur féminisme, la drogue, le patriarcat, le jeunisme, l’alcool, la parentalité, la célébrité, la désintox et les réseaux sociaux… Mais franchement je n’en garderai pas un souvenir impérissable comme ce fut le cas pour Vernon Subutex.
Globalement j’ai été très déçue par la forme mais aussi par le fond car les sujets traités auraient mérités qu’on s’y attardent vraiment. Là, c’était plutôt une avalanche d’idées toutes faites qu’on entend H24 ici et là sur Facebook et autres medias.
Cher connard de Virginie Despentes : Quelques extraits :
Sans l’envie du pauvre, le bonheur du riche n’est pas incomplet : il est anéanti.
Il est étonnant que tout repose sur ce paradoxe – qu’on attribue aux femmes la fragilité la douceur la délicatesse alors qu’elles accouchent en s’ouvrant le bassin en deux et qu’elles survivent seules dans des villes bombardées.
Les hommes, nous ne les avorterons pas, nous ne les priverons pas d’éducation, nous ne les brûlerons pas sur un bûcher, nous ne les tuerons pas dans les rues…
J’en ai marre de la sincérité. J’ai juste envie d’être un gros con. D’avoir mauvais esprit. de détester les gens ; de les mépriser. de prétendre qu’ils sont la cause de tous mes problèmes.