La langue française est riche de milliers de mots pour exprimer nos émotions et nos sentiments. Mais comme nous sommes souvent experts en difficulté, pourquoi utiliser des mots alors que nous avons la ponctuation… Le point pour clore, la virgule pour marquer une pause, le point d’exclamation pour montrer l’étonnement, le point d’interrogation qui appuie le questionnement et les points de suspension qui expriment ce qu’on ne sait pas nous-mêmes. Toujours au nombre de trois à la suite, les points de suspension permettent en effet de transformer une phrase en y ajoutant du suspens, de transmettre le message qu’on a en tête et que l’autre doit deviner. Alors, comment interpréter les points de suspension en matière de séduction ?
Les ancêtres théâtraux des points de suspension
À l’origine, les points de suspension ont une fonction précise uniquement dans le domaine théâtral. Ils sont une convention inventée par les typographes français du XVIIe siècle afin de représenter textuellement une indication scénique. En l’occurrence, l’interruption du dialogue d’un personnage.
On les nomme alors « points de coupure » ou « points d’omission ». Seulement voilà, une ambiguïté demeure : comment savoir si cette indication relève d’une intervention du discours de l’autre ou d’une réticence jetée sur un énoncé que l’on n’ose ou ne souhaite terminer ?
Il faut attendre le XVIIIe siècle pour que les points de suspension soient dotés de nouvelles fonctions. Ils peuvent intervenir pour produire une suspension à l’intérieur de la phrase ou se placer à la fin d’un énoncé en apparence complet. Finalement, ces caractères évoquent ce qui est de l’ordre de la latence : le signe veut toujours dire « que quelque chose est susceptible d’apparaître ».
Comment utiliser les points de suspension en séduction ?
Les points de suspension peuvent, en fonction des circonstances et du sujet, apporter un éventail de nuances au sens d’une phrase. Ils peuvent être le signe d’une certaine hésitation, d’une indécision ou d’une réticence. Ils peuvent aussi symboliser une situation ou une action inachevée. Dans tous les cas, il sera fait appel à l’imagination du lecteur pour deviner quel est le sens le plus probable dans le contexte de l’échange épistolaire.
Les points de suspension, outil parfait pour les timides
En fin de SMS ou de mail, l’usage de points de suspension démontre une hésitation de la part de celui qui l’a écrit. Elle peut être interprétée comme une volonté de ne pas dire exactement le fond de sa pensée, par timidité. Par exemple, c’est le cas dans une phrase comme : « J’ai passé un très bon moment… J’aime ta compagnie...».
Les points de suspension, pour appuyer un ressenti
Ils nous aident également à exprimer ce que l’on ressent en simplifiant les idées pleines de sens que nous avons en tête, en sous-entendant et en faisant comprendre à l’autre l’importance de ce qui est suggéré « Tu vois très bien ce que je veux dire… ».
Ils peuvent aussi appuyer nos propos pour montrer leur importance, par exemple la beauté d’un « Tu me manques… ».
Les points de suspension, pour éveiller la curiosité
Parfois, on n’ose pas écrire complètement ce que l’on a à dire et on laisse planer un doute, on crée une attente et on éveille la curiosité de l’autre. Par exemple : « Je dois te parler …», Les trois petits points se veulent une arme redoutable pour exprimer plus que ce que l’on veut dire et pour permettre un futur échange.
Les points de suspension, pour exprimer l’étonnement
Exprimant le fait d’être surpris, étonné, parfois même carrément choqué, les points de suspension peuvent être la métaphore de l’expression « être bouché bée ». Ils appuient une phrase construite de type classique sujet-verbe-complément et expriment à quel point l’auteur est abasourdi : « Je n’en reviens pas… »
Les points de suspension, pour marquer le suspense
Les points de suspension, comme leur nom l’indique d’une certaine façon, marquent le suspense. Ces trois petits points ultimes ont pour but de susciter l’intérêt … jusqu’à la ligne du dessous, technique incroyable mais qui fonctionne très bien en séduction, pour preuve : « Tu sais très bien…que tu me plais… tu me manques… que j’ai envie… de toi. »
Comment interpréter les points de suspension en matière de séduction ?
À la suite d’une phrase telle que : « A plus tard… », il faut se référer au contenu du message avant de pouvoir déduire la signification des points de suspension. En effet, si le contenu du message est positif et chaleureux, il ne peut subsister aucun doute : l’auteur du message a très envie de vous revoir et attend une confirmation de réciprocité de votre part.
Si le message est neutre ou agacé, les points de suspension pourront signifier que l’auteur du message n’ose pas vous dire qu’il n’a pas envie de vous revoir et sous-entend « à plus tard, peut-être » dans son message, comme un « au revoir » non assumé sur le moment.
Il n’y a pas à dire, c’est un fait, en matière de séduction, les points de suspension sont vraiment suggestifs ! Leur occurrence cache de multiples sens selon la phrase dans laquelle ils sont inscrits.
Par exemple : « J’ai passé une merveilleuse soirée…» et « Mon rendez-vous s’est mal passé…». D’instinct, nous comprenons la première phrase ainsi : « J’ai passé une merveilleuse soirée, vivement la prochaine. » Alors que la seconde, elle, laisse entrevoir une issue moins heureuse : « Mon rendez-vous s’est mal passé, je ne la reverrai pas ». La différence de ton est manifeste, n’est-ce pas ?
Mais dans les deux cas, les points de suspension remplissent ici la fonction de litote, cette figure de rhétorique qui consiste à en dire moins pour laisser entendre beaucoup plus qu’il n’est dit.
Comment ce signe de ponctuation est-il devenu, finalement, plus évocateur que les mots eux-mêmes ?
Que retenir ? Le simple point, trop objectif, trop brutal, ne laisse pas de place à l’expression d’un sentiment. Les points de suspension, eux, dérangent la phrase et son sens. Ils disent l’hésitation et révèlent l’impuissance des mots qui voudraient la traduire.
Les points de suspension sont du côté de la séduction, de l’équivoque. Julien Rault dans son livre « Poétique du point de suspension : Essai sur le signe du latent » note cet exemple. Dans une scène du film Intouchables, le personnage joué par François Cluzet reçoit un message d’une femme qu’il souhaite conquérir. Driss (Omar Sy), en décortique le contenu ainsi : « Elle a écrit ‘‘Je viens à Paris la semaine prochaine, appelle-moi… », trois petits points. Vous comprenez ce que ça veut dire? (…) Trois petits points, elle veut pécho ! »
Vous l’aurez compris, encore aujourd’hui, vous pouvez faire passer beaucoup de choses, émotions, ressentis, envies, avec les points de suspension en séduction.
Vous pouvez exprimer votre curiosité, votre intérêt, vos doutes, vos envies, votre impatience. Et susciter la même chose chez l’autre.
Ne vous en privez pas mais utilisez les à bon escient dans le jeu de séduction.
Très instructif !
Mon cas perso que je n’arrive pas à analyser :
Je propose un concert à mon crush(il ne le sait pas) : il me répond
« Merci pour l’info mais j’ai déjà quelque chose de prévu… »
Ces 3 points m’interrogent…