J’ai peur. Oui, ce soir j’ai peur. J’ai peur qu’à nouveau tu t’en ailles, qu’on se déchire encore une fois. J’ai peur de ressentir ce que je n’ai cessé de ressentir ces mois passés. J’ai peur d’être heureuse maintenant ; maintenant que je sais combien ça fait mal quand tu t’éloignes. J’ai peur d’être déçue à nouveau, même si je sais que tu ne fais rien pour. J’ai peur de t’aimer aussi fort aujourd’hui et que demain je me sente vidée, sans plus aucun intérêt, sans toi. J’ai peur de pleurer à en vouloir m’arracher le cœur. J’ai peur d’avoir mal à vouloir m’arracher les tripes. J’ai peur d’espérer que tout s’arrange pour finalement tomber de l’échelle.
J’ai peur que cette toute nouvelle sensation, que ce tout frais bonheur ne dure pas. J’ai peur que tu me dises que tu n’arrives pas à t’en sortir, et que tu préfères rester seul, que je te laisse seul. J’ai peur de devoir me battre à nouveau aussi dur que je me suis battue pendant tout ce temps. Pour toi. J’ai peur de ne pas réussir à lutter si jamais un jour je dois le faire. J’ai peur qu’on m’enlève ce que j’ai de plus cher aujourd’hui : toi.
Même si toutes ces pensées semblent contradictoires, elles se complètent. Et j’ai peur que ce qui nous complétait, ne finisse par nous séparer. J’ai peur de tomber encore une fois et d’égratigner mon cœur. Je sais bien que quand on tombe de vélo, qu’on se blesse au genou, on doit se relever vite et remonter sur sa selle, mais moi, là, je ne suis pas sûre de me relever si je me casse la figure. Je sais que ce sera la dernière égratignure qui finira par découdre mon cœur. Parce que ce n’est que de la couture de fortune ; ça ne tient pas, ça se défait à chaque fois, comme un pansement qui prend l’eau et se décolle pour laisser apparaître la plaie.
Alors oui, j’ai peur du bonheur parce qu’il semble éphémère. Et je ne le veux pas éphémère, le bonheur. Je le veux entier, durable. Avec toi. Alors, j’ai peur que tu me laisses seule, face à mon reflet dans le miroir. Que tu me laisses comme plantée là sur le trottoir d’un endroit inconnu. Que tu m’abandonnes, que tu me livres à ce monde cruel, ce monde si cruel sans toi. Sans toi pour éclairer mes nuits, pour me guider sur le chemin. Sans toi pour me faire rire à en pleurer. Sans toi pour m’embrasser à nous écorcher les lèvres. Sans toi pour m’enlacer à m’empêcher de respirer. Sans toi, mon oxygène.
Magnifique lettre !