La charge mentale qui pèse sur les femmes en général et les mères en particulier n’est plus à prouver. C’est un sujet dont on a déjà parlé sur Parler d’amour, pour en expliquer les causes, les conséquences et vous partager des solutions pour vous en défaire. Mais vous donner la parole sur le sujet nous a semblé essentiel. Voici deux exemples de témoignages sur la charge mentale des femmes. L’un de ces témoignages aborde plus particulièrement le cas de la charge médicale, qui est un des éléments de cette charge plus globale.
Rappel sur la charge mentale des femmes et des mères
Avant de vous partager ces témoignages sur la charge mentale des femmes, voici un petit rappel sur ce qu’est la charge mentale.
Définition de la charge mentale
En 1984, la sociologue Monique Haicault définit la charge mentale. C’est le fait de « devoir penser simultanément à des choses appartenant à deux mondes séparés physiquement », comme la maison et le travail, son rôle de femme active et de mère de famille.
Le Larousse a fait entrer la charge mentale dans l’usage commun à travers la définition suivante, plus précise et plus en lien avec nos sociétés. « Un poids psychologique que fait peser (plus particulièrement sur les femmes) la gestion des tâches domestiques et éducatives, engendrant une fatigue physique et, surtout, psychique. »
Témoignages de femmes sur la charge mentale : quelques chiffres
La charge mentale pèse sur les femmes en couple ou mariées et davantage encore à partir du moment où elles deviennent mères, que le père soit présent ou non. Selon l’INSEE, les femmes effectuent 71% des tâches ménagères et 65% des tâches parentales.
D’après une étude menée par IDM–Familie pour le site MagicMaman, 91 % des femmes ont à trop de choses à penser et à gérer seules une fois qu’elles deviennent mères.
Près d’1 mère sur 2 (48%) déclare avoir une charge mentale énorme, l’évaluant entre 8 et 10/10. Cette charge a un impact sur le quotidien. 83 % des mères déclarent de la fatigue, 56 % une irritabilité, 46 % du stress. Et pour 35 %, elle peut faire naître des tensions au sein du couple.
Pour en savoir plus sur la charge mentale des femmes :
- Charge mentale et charge émotionnelle, qu’est-ce que c’est et comment s’en défaire ?
- La charge émotionnelle : ces femmes épuisées de devoir toujours penser à tout
La charge mentale, c’est donc avoir l’esprit sans arrêt occupé et se sentir débordée, par peur d’oublier quelque chose. Manque de temps, sensation d’urgence, tout cela engendre une spirale infernale dans laquelle chaque jour semble se répéter. Pour ne pas que cela devienne un cercle vicieux, vous pouvez lire Comment soulager les mères de la charge mentale ?
Si vous avez besoin d’aide, que vous n’arrivez plus à retrouver une vie sereine entre vos rôles de femme, de mère et peut-être d’épouse ou de maman solo, Parler d’amour vous propose un accompagnement personnel en ligne. N'attendez pas de tomber pas dans l’épuisement émotionnel et mental ou en burn-out maternel.
Témoignages de femmes sur leur charge mentale : l’exemple de Johanna
Johanna a 37 ans, elle est en couple depuis 10 ans et a des jumelles de 3 ans. Elle vit en couple avec son conjoint, le papa de ses filles et est traductrice dans une maison d’édition. Elle adore son métier, aime son chéri et ses filles. Mais elle se bat chaque jour avec une charge mentale de plus en plus prenante. Si son homme n’est pas un macho, pour autant, le partage des tâches dans le couple n’est pas équilibré. Merci à elle pour son témoignage.
J’aimerais ouvrir les yeux à mon conjoint sur ma charge mentale : le témoignage de Johanna
Je m’appelle Johanna et je voulais partager mon témoignage sur la charge mentale qui pèse sur de nombreuses femmes. Je suis concernée, même si je suis en couple, si je n’ai « que » deux enfants et un travail que j’ai choisi. Mais même en étant une mère organisée et une femme active qui sait gérer son planning, je me sens dépassée de plus en plus souvent…
Ce poids invisible mais pourtant bien présent, comme une responsabilité permanente, épuisante et encore trop souvent culpabilisante…
En tant que femme, j’ai toujours été frappée par cette injustice. Toute petite déjà, à voir ma mère et mes grands-mères tout gérer à la maison, les courses et les repas, les lessives et le ménage, les enfants du matin au soir. Ma mère travaillait pourtant mais c’était comme ça : mon père s’occupait des « trucs d’homme » ! Vous savez : le bricolage, la mécanique, les urgences. Alors oui il faisait sa part mais pour des corvées ponctuelles, pas au quotidien…
Et que dire de ma grand-mère paternelle, qui certes ne travaillait pas, mais gérait tout, seule. Je revois encore mon grand-père mettre les pieds sous la table en attendant d’être servi…
Je pensais que je ne connaitrais pas ça grâce à ma force de caractère de femme indépendante, et je n’ai pas exactement le même quotidien qu’elles, heureusement. Mais quand même, certaines habitudes ont la vie dure. En devenant adulte, la femme que je suis a compris que c’est une construction sociale profondément enracinée depuis toujours dans notre société patriarcale. Il ne faut rien lâcher mais faire changer les mentalités, c’est un travail de chaque instant…
Cette pression constante de devoir tout gérer et anticiper les besoins de ma famille, elle existe bel et bien. Qui pense aux menus de la semaine, aux rendez-vous médicaux des filles, aux lessives, ou encore à donner le planning à la nounou, en plus de son travail ?
Moi, encore moi et toujours moi… Tout semble reposer sur mes épaules. Alors oui, mon conjoint est là, il fait plein de choses mais il anticipe peu. Comment dire… La charge mentale, ce n’est pas seulement faire les choses, mais aussi penser à tout et s’assurer que rien ne sera oublié !
Jongler avec les horaires, les listes, les rappels. C’est un travail mental constant qui peut parfois devenir écrasant quand l’autre ne le fait pas. Déléguer, je le fais. Mais c’est comme si c’était normal que mon cerveau soit celui qui doit fonctionner pour deux…
Je vous parlais de culpabilité. Oui, parfois je me sens étrangement coupable en plus d’être en colère. Pourquoi ? Parce que j’ai l’impression de ne pas être à la hauteur, de ne pas gérer comme il faut. Alors que ce n’est pas à moi de me remettre en question… Quand cela arrive, la colère augmente parce que je me sens incomprise et que je ne sais plus quoi faire pour changer les choses.
Est-ce que je vais bien ? Cela dépend des jours, des semaines, de ma charge de travail, des urgences…
Dire que cela n’a pas un impact sur ma santé mentale et émotionnelle, ce serait mentir. Je me sens souvent submergée, stressée et épuisée. J’ai l’impression de ne jamais pouvoir me détendre complètement, car il y a toujours quelque chose à penser ou à faire.
Ce que j’aimerais ? Avoir plus de temps, ouvrir les yeux vraiment à mon conjoint, pouvoir lâcher prise en toute confiance. Et avoir enfin la reconnaissance que je mérite pour me sentir valorisée et prise en compte. On s’aime, et je sais qu’il me respecte, mais il prend pour acquis un mode de fonctionnement en couple qu’il a connu enfant et qu’il répète. A force d’en parler, de lui faire comprendre, certaines choses ont changé. Doucement mais sûrement, alors j’espère vraiment qu’on est sur la bonne voie.
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Témoignages de femmes sur leur charge mentale : l’exemple de Marion
Marion a 34 ans, un bébé de bientôt 12 mois et est en couple avec le papa depuis 5 ans. Ils vivent ensemble et travaillent tous les deux. Après son congé maternité, Marion a repris son travail dans une boutique de prêt-à-porter. Depuis sa grossesse et la naissance de son fils, elle a pris conscience d’une chose spécifique dans sa charge mentale : la charge médicale. Vous connaissez ? On vous explique tout dans la charge médicale sur les femmes, qu’est-ce que c’est ?
Je gère la charge médicale de mon conjoint et de mon fils au détriment de ma santé : le témoignage de Marion
La charge médicale, comme beaucoup de femmes je pense, je ne savais pas ce que c’était avant. J’avais entendu parler de la charge mentale évidemment et je voyais beaucoup d’amies autour de moi y être confrontées. Mamans avant moi pour certaines, c’est vrai qu’au bonheur d’être mères s’ajoutait le poids de cette charge mentale.
Lors d’une soirée entre filles, je me rappelle d’un échange entre deux amies :
- Non je te jure j’en ai marre, je ne suis pas sa mère ! A chaque fois, c’est pareil, quand monsieur est malade, tout le monde en profite et faut tout lui faire. Le rendez-vous chez le médecin, la pharmacie, les médocs à préparer… Un enfant je te dis !
- M’en parle pas, à la maison, idem ! Il se plaint d’avoir mal ou d’avoir de la fièvre, mais faut prendre rendez-vous à sa place chez le médecin. La dernière fois, je lui ai rappelé que Doctolib, c’était aussi facile à télécharger sur son portable que Candycrush…
Et une troisième leur a répondu :
- Vous connaissez la charge mentale les filles, bah ça c’est le cas spécifique de la charge médicale ! Encore pour notre pomme !
C’est là, en parlant entre nous, que j’ai appris comment on appelait cette habitude pour beaucoup d’hommes de considérer leur femme ou leur copine comme leur infirmière bénévole !
Alors au début, on se dit que c’est mignon, que ce sont de grands bébés en fait et qu’on a envie de les chouchouter… Pour réaliser au final qu’ils nous prennent pour leur mère et que c’est usant…
Quand nous avons emménagé ensemble au bout d’un an et demi, j’ai vu une image de lui que je ne connaissais pas. Pas celle d’un malade imaginaire ou d’un hypocondriaque. Mais c’est vrai que mes petits pépins de santé si j’en avais, passaient toujours après ses petits bobos. Sur le moment, je n’y ai pas prêté attention. Il me demandait souvent de m’arrêter à la pharmacie pour lui en même temps que d’autres courses par exemple, et je le faisais machinalement.
Pendant ma grossesse, c’était normal que je m’occupe de mon suivi, évidemment. Mon chéri m’a accompagnée, rien à lui reprocher là-dessus. Cette période était un peu celle de mon immunité, tout tournait autour de mon état et de la future arrivée de bébé. Je réalise maintenant que ces 9 mois sont la seule période où c’était lui l’infirmier.
Mais depuis l’arrivée de notre petit bonhomme, disons que le naturel a repris le dessus.
Tous les rendez-vous pour bébé depuis 9 mois au moins, c’est moi qui les prends, et c’est moi qui y vais. Il va me dire qu’il a l’impression que le petit a une otite, mais rien ne va se passer. Il s’attend à ce que ce soit moi qui gère. Tous les mois, c’est moi qui vais au rendez-vous. Il est venu aux 2 ou 3 premiers et quand il a constaté que notre bout de chou allait bien, il m’a dit que ça ne servait à rien d’être deux pour ses vaccins ou ses mesures mensuelles. Déjà, je trouve cela triste de penser ça. Et en plus, il n’a jamais demandé à y aller à ma place.
Pour lui, c’est normal que ce soit à la maman d’aller chez le pédiatre, de parler à la pharmacienne ou au médecin traitant. C’est moi qu’on appelle au travail, jamais le papa. Pourtant la crèche a son numéro aussi ! Par contre, si le papa vient, change une couche ou a pensé à prendre le doudou, on le félicite… Faut arrêter ça, surtout de la part d’autres femmes, ça ne nous rend pas service du tout ! Les papas aussi sont aptes à s’occuper de leurs enfants, et ils en ont aussi le devoir !
Et s’il n’y avait que ça… Quand je prends rendez-vous pour moi, il en profite pour me demander de le faire pour lui. « Chérie, moi aussi faut que j’aille chez le dentiste » ou pire « tu sais quand je dois retourner chez l’ophtalmo ? »
En fait, la charge médicale des femmes, c’est oublier sa propre santé, la mettre entre parenthèses pour s’occuper de celle de son ou ses enfants… et du papa ! Prendre les rendez-vous médicaux, suivre les traitements, gérer les maladies et les urgences…
A la longue, c’est usant et ça peut vraiment être grave, je l’ai réalisé l’autre soir quand j’ai vu que j’avais complètement oublié de prendre mon rendez-vous de suivi gynécologique mais que par contre, tout était calé pour bébé et pour lui, parce que JE lui avais pris ses rendez-vous chez un kiné et chez le dentiste. J’étais en colère et j’ai explosé ce soir-là… Aura-t-il compris ? Je ne sais pas pour combien de temps. En tout cas, j’ai arrêté d’aller dans son sens en m’occupant en priorité de sa santé. Qu’il se débrouille un peu… Et le prochain rendez-vous pour notre loulou, pour ses 1 an, il viendra avec moi, je ne lui laisse pas le choix !